La face cachée des SSII / ESN : le monde du petit prestataire

Alors je vais déroger à la règle et je ne vais pas faire un post sur l’électrosensibilité ce coup-ci, ça me permet de penser à autre chose 🙂

Mon post précédent sur mon entretien à Rennes m’a fait penser à toutes les façons dont les sociétés de services et d’ingénierie en informatique (SSII) ont essayé de me truander et je vais faire un petit récapitulatif de toutes les techniques perfides qui ont été utilisées contre moi.

Le plus souvent les sociétés de services essayent de se faire le plus de marge possible sur votre dos, ce qui implique que leur premier souhait est de vous rémunérer le moins possible afin qu’ils s’en mettent plein les fouilles …

Le salaire

Un fixe qui se décompose (salaire pyramidal) : la technique est simple, le recruteur et le candidat se mettent d’accord sur un salaire fixe à l’année. Mais lors de la signature, on vous donne un petit tableau avec le détail de votre rémunération et là on se retrouve avec la participation, l’intéressement et le 13eme mois dans le salaire que vous aviez négocié. Ce qui fait qu’au lieu d’avoir votre salaire bonifié des avantages des grandes boites, votre salaire au mois est bien moindre que vous le pensiez et vous perdez l’avantage financier de la dite grosse boite …

Un fixe primé : Ce n’est pas vraiment du truandage mais c’est des pratiques courantes, au lieu d’être rémunéré en fixe, vous êtes payé en fixe + prime. Ce qui au final ne change rien à la fin du mois, vous payez moins d’impôt mais vous cotisez moins pour la retraite et pour le chômage.

Couteau sous la gorge : Là pour le coup c’est de la technique pas très orthodoxe, en gros vous donnez vos prétentions salariales puis vous passer un entretien chez le client, ce même client vous accepte et la on vous indique une rémunération bien moindre que vos prétentions d’origine et on ne vous laisse pas le choix …
Technique à double tranchant car si le candidat n’accepte pas le commercial qui vous à présenter au client doit sortir une excuse bidon au client pour justifier que vous ne prenez pas le poste…

Pour gagner de l’argent, il faut placer le petit prestataire chez le client et la toutes les techniques sont bonnes pour que les entretiens se passent sans accro …

Les entretiens

Le CV surprise (ou bidonné) : La faute n’est pas qu’aux commerciaux, les clients sont aussi responsables à vouloir un mouton à 5 pattes pour pas un rond. Ce qui fait qu’on peut se retrouver ingénieur alors que l’on est simple technicien, ou que l’on connaisse des technologies alors qu’on n’a jamais travaillé dessus. C’est assez désagréable, parce que moi qui n’aime pas mentir (surtout qui ne sait pas mentir …) on se retrouve dans des situations assez délicates surtout quand on est devant le client et que le commercial vous donne votre CV et au fur et à mesure qu’on le lit, on se demande à qui il est ? On vérifie le nom, ah si c’est bien moi, je ne savais pas que je faisais autant de chose …

La doublette : Quand un commercial d’une SSII doit absolument placer un mec sur un poste parce que sinon le dit poste va lui passer sous le nez il met en place un double entretien comme cela il double ses chances en présentant deux candidats en même temps. Et le top du top pour un commercial c’est de trouver un novice qu’il va dénicher sur Monster ou Les Jeudis, qu’il sait pertinemment que le mec n’a aucune chance de décrocher le poste, oui mais en face il présente son candidat qui lui-même s’il est un peu light fera meilleur figure que le débutant d’en face et voilà comment je te place des boulays chez le client. Exemple ici

Entretiens pour le fun (sourcing) : Autre pratique très courante dans le domaine des sociétés de services, c’est de récupérer le plus de CV possible afin de se faire une grosse base de données et de pouvoir piocher dedans ultérieurement ou de les revendre. Si vous postez votre candidature sur les sites d’emploi comme Monster ou Lesjeudis, vous allez avoir tout plein de rendez-vous avec des commerciaux avec au préalable un remplissage de votre CV au format de leur bon vouloir mais au final vous allez parcourir tout Paris pour pas grand chose… Dès le départ il faut demander s’il y a un poste chez un client, si la réponse est négative, il ne sert à rien de se déplacer … Exception faite de l’embauche sur profil.

Et il y a encore quelques autres techniques plus au moins légal dans le milieu :

Divers

L’intérim pas si temporaire : J’ai travaillé pendant un an et demi dans une société en tant qu’intérimaire et les contrats étaient renouvelés tous les mois. Pour ceux qui connaissent un peu le droit du travail vous allez me dire que c’est interdit, oui sauf que ces malins indiquaient à chaque renouvellement de contrat que c’était pour compenser une hausse de l’activité, comme ça pas de problème, y avait rien d’illégal, alors qu’en réalité l’activité en question n’augmentait quasiment pas, en tout cas en terme de charge de travail …
Et il y avait au moins 6 personnes dans le même cas que moi dans le service, par contre quand ils ont voulu nous embaucher ils ont été un peu radins et je me suis barré rapidos …

La règle des deux 3 : Cette règle mystérieuse est la clé de voûte de la flexibilité des clients mais aussi de la société de services qui vous emploie. Le premier 3, c’est 3 ans, c’est le temps que vous passez chez un client après lequel vous pouvez faire une demande d’embauche. Le problème c’est que le client n’est pas trop chaud et en général se sépare du prestataire, même si celui-ci faisait bien son boulot pour le remplacer par un autre qui aura pourtant moins d’expérience dans l’entreprise. Ce qui m’amène au deuxième 3, après s’être fait virer, le prestataire est en inter-contrat, période pendant laquelle le prestataire est payé à rester chez lui au mieux, au pire à faire des basses besognes dans sa société. Cauchemar de nos chères commerciaux qui vont tout faire pour vous recaser chez un autre client même si votre profil ne correspond pas aux postes des diverses offres disponibles. Au bout du 3eme refus de poste, c’est la case pôle-emploi qui attend l’ex-prestataire … Pour pallier à la première contrainte, certains clients ont trouvé une parade en ayant recours à des mini-infogérances de deux ou trois salariés.

Heures supplémentaires fantômes : En informatique et spécialement en production il nous arrive de faire des heures supplémentaires le week-end ou pendant la nuit mais voilà le client ne veut pas raquer. Alors comment se débrouillent nos chers commerciaux pour que ça soit transparent ? C’est très simple, le collaborateur travail une nuit ou un week-end en dehors de ses heures de travail régulières. Ensuite, pour récupérer, il va signer une demande de congés pour une journée donnée a laquelle il ne viendra pas travailler (normal quoi) et la société de services va néanmoins facturer cette même journée au client mais pas celle qui aura été effectuée en dehors des horaires réguliers, comme ça ni vu ni connu tout est transparent et à la fin la même feuille de congés est déchirée. Tout ça pour qu’au cas où il y est un pépin lors de la journée soit disant travaillée il n’y ait pas de problème car vous devriez être sur votre lieu de travail et vous n’êtes pas couvert par les assurances de la boite. Donc en résumé, vous êtes punissable de faux en écriture, travail dissimulé, si vous avez travaillez un week-end en théorie vous êtes payé 150% alors qu’en pratique vous êtes payé 100%, donc en gros la grosse carotte …

Maintenir les effectifs pour éviter l’effet de seuil : Quand une société de moyenne taille ne veut pas trop perdre de bénéfice parce qu’au-delà d’un certain nombre de collaborateurs elle est obligée de reverser des participations ou de l’intéressement, il suffit juste de créer une filiale et de repartir les bénefs sur les deux sociétés et idem pour les collaborateurs. Et hop ni vu ni connu je t’embrouille les collaborateurs …

Formation : Si vous êtes en mission et que vous demandé une formation qui n’est pas en adéquation avec cette même mission, vous ne l’aurez pas parce que ce n’est pas dans l’intérêt de votre employeur. Vous lui coûtez toujours trop de pognon, alors si en plus il faut payer une formation qui n’est pas dans son intérêt, il ne faut pas pousser le bouchon trop loin … Bien que cela est peut-être changé, dans tous les cas, demandé une réponse écrite pour le refus de la formation, car au bout de la 3eme fois ils ne peuvent plus refuser.

Manipulation : Alors la c’est le pompon, pour ce coup-ci un manager d’une grosse SSII a utilisé une technique assez redoutable pour me faire accepter une chose que je ne voulais pas faire. À l’époque je travaillais pour une grosse SSII, Logica pour ne pas la citer, qui m’avait vendu à une assurance en tant qu’analyste d’exploitation Windows, ce qui ne m’intéressait pas des masses, puisque moi je voulais faire de l’Unix. Je fis remonter mes griefs à mon commercial qui a pris peur et a organiser une tripartie avec un manager. J’avais l’habitude de m’habiller assez classe pour rentrer dans le stéréotype de l’informaticien dans le vent mais en réalité j’étais déjà asocial bien avant mon électrosensibilité, le détail à son importance. Donc la réunion commence, déjà je me sens en minorité puisqu’en face de moi j’ai le commercial et le manager de la boite, je commence à exposer le fait que la mission ne me plaît pas et j’ai pour réponse du blabla de manager, c’est la mission de ma vie, propulsion de ma carrière, etc … Le truc qui me passe au-dessus de la tête et je ne le regarde même plus tellement son discours me saoul. Il me le fait remarquer et a priori il change de technique et passe en mode psychologue. Donc il avait remarqué que je m’habillais classe, pensait que j’étais le roi du disco :lol:, il fit donc une analogie avec une sortie en boite de nuit. Il me plaça dans le contexte d’une entrée de boite la plus réputée du coin (m’avait sorti le nom de l’une d’entre elles pour faire plus vrai …), accompagné d’un belle fille, pour lui c’était obligé, je devais rentrer dedans, et ben pour la mission c’était pareil, c’était une chose à pas louper. Le hic c’est rien que de penser à l’idée de sortir en boite me hérissait les poils et j’ai compris après coup qu’il essayait de me manipuler mais ça technique ne marchait pas sur les personnalités un peu tordues comme la mienne :D. Par la suite je me suis pas trop posé de question, j’ai balancé ma démission dans la semaine qui a suivi …

A+ Jay

Liens Associés :

Rue89.com : Etudiants ingénieurs, gare à la « presta », face cachée du métier
berthier.free.fr : le livre noir du consulting
developpez.com : « L’enfumage des SSII » : que pensez-vous du processus de recrutement de ces entreprises ?

16 réflexions sur “La face cachée des SSII / ESN : le monde du petit prestataire

  1. super article! Je me mords les doigts de ne pas l’avoir lu avant mon entretien…j’ai eu la technique number one du top ten sur le salaire qui se décompose…maintenant c’est moi qui me décompose…

  2. Ah ça m’étonne pas que ce genre de technique perdure dans les sociétés de service, toujours à vouloir faire du fric sur le presta, perso ça m’avais moyennement plu et c’est un peu pour ça que j’étais parti. Normalement vous être en période d’essai profitez-en pour voir ailleurs si vous ne trouvez pas une boite un peu plus sérieuse 😉

  3. Merci pour l’article et votre effort malheureusement tout le monde est dans le même cas chez les SSII, j’ai subi tous ça et après plus de 4ans de travail on me licencie pour mon premier inter-contrat qui n’as pas durée plus d’un mois !!!

    • Désolé pour votre licenciement 😦 , mais il me semble assez peu probable que votre SSII ait agit dans les règles, vous avez été licencié pour quelle raison ?

  4. En même j’ai l’impression qu’on a pas le choix. Tout ce qu’on trouve c’est des SSII. A part les 3 gugusses qui ont réussi à sucer les bonnes personnes au bon endroit au bon moment et se retrouve embaucher chez le client final.

    • je ne serais pas tout à fait d’accord avec vous, en effet quand on est jeune diplômé en-dessous du master, pas trop le choix, pour évoluer ça se fera par la case SSII, mais à terme avec la bonne expérience et les bons outils maîtrisés, on peut rentrer dans une boite en interne. Par exemple si j’avais pas été malade, j’aurais pu rentrer en interne chez Cégédim, une bonne boite à priori, ce n’est donc pas impossible, ça demande un peu de temps et pas hésiter à changer de société de service quand on stagne, ça permet de monter en compétence et en bonus d’augmenter son salaire 🙂

      Cdt,

      Jérôme

  5. Super article. Je bosse moi même pour une SSII et je sais ce que c’est. Le plus fou c’est qu’un commercial qui n’y connaît rien sur le domaine technique essaie de vous convaincre que tel ou tel projet serait bien pour votre carrière, alors qu’ils n’y connait strictement rien. Le plus triste c’est que la plupart du temps on n’a pas le choix car il faut bien gagner de l’expérience quelque part.

      • C’est dommage au final de devoir réfléchir comme ça. C’est impossible de se donner à fond, on sait qu’ils nous jetterons quand ils auront plus besoin de nous.
        Et on enchaine les boites, certains semble trouver la bonne…
        Et quand j’en vois d’autres qui ont des boulots de planqués indéboulonnables qui ne font rien et ont tous les avantages ça m’irrite un peu.

      • ah c’est sur que quand l’on connaît la finalité de la prestation, on pourrait faire l’erreur de ne pas s’investir, après ça dépend du boulot, mais le but c’est de prendre le plus d’expérience possible pour accumuler des lignes sur le CV autant que faire ce peut et une fois que le poste a trouvé ces limites à vos yeux, faut changer, pas trop souvent non plus…

  6. Vous êtes pas genre la plus grosse victime du monde ? Bordel, tout ce que vous décrivez est tellement risible, faut avoir 15 ans ou être une sacrée merde (pardonnez moi l’expression) pour se laisser berner de la manière dont vous le racontez ahah. J’espère sincèrement que c’est exagéré..
    bon courage à vos futurs employeurs sinon.
    PS : j’suis presta aussi, mais j’ai géré les conditions moi.

    • Merci pour ce commentaire élogieux mais je pense que vous avez mal compris ma démarche.

      Ce n’est pas de passer pour une victime mais de faire un retour d’expérience.

      Après si vous vous en êtes sorti dans le monde des ESN, ça ne m’étonne pas du tout, moi-même je m’étais fait ma place à l’époque…

  7. Nous sommes en 2017, je viens de signer pour travailler dans une petite ESN, pour un poste de recruteur / growth hacker.
    En effectuant mon étude de marché, je suis tombée sur cet article. Magnifique, vrai et rigolo!!
    Merci!!

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