La proposition de loi de la Député Laurence Abeille avait été un peu diminué mais finalement voté à l’Assemblée Nationale en janvier dernier. Il ne restait plus que le sénat pour que cette loi soit enfin mise en application mais dès les commissions du développement durable et économique, elle a été massacrée notamment par le sénateur socialiste et l’un des rapporteurs en commission, M. Raoul, qui l’a éparpillé façon puzzle, c’est le moins que l’on puisse dire …
Je ne sais pas dans quelle condition ont été voté les amendements concernant ce texte de loi car il n’y aucun compte-rendu de ces commissions à l’heure où j’écris ces lignes mais tout ce que je peux constater en lisant les amendements adoptés, c’est que les sénateurs présents n’y ont pas été de main morte le 10 juin dernier. Entre les suppressions d’articles et de certains alinéas, pas moins d’une dizaine en tout, et pour ceux qui ont résisté, pas mal d’entre eux ont vu leurs portées réduites à leur plus simple expression. Si le titre de mon article peut sembler légèrement provocateur, dans les faits c’est un constat, on le voit notamment avec les modifications sur la forme de la proposition de loi. À l’Assemblée nationale, l’UMP à travers Laure de la Raudière qui avouait que certains amendements qu’elle avait déposé lui « ont été envoyés par les opérateurs« , n’ont eu de cesse que de vouloir remplacer le mot « modération » par « maitrise » mais à l’époque ces amendements avaient tous été rejetés. Et devinez qu’elles ont été une de plus fois les amendements déposés, la fameuse maîtrise des expositions, amendement déposé par l’UMP mais qui a finalement fait place à la sobriété par un amendement déposé par un sénateur PS qui a été adopté et a ainsi modifié le titre et le premier alinéa de l’article 1er durant les commissions sénatoriales, du coup plus de modération, une première manche gagnée par le lobby des télécoms.
On pourrait ce dire que ce n’est pas trop grave, qu’un intitulé d’une loi ne fait pas la loi en elle-même mais il s’avère que sur le fond aussi, cette proposition a été aussi mal traitée. L’article premier, qui était le cœur de cette PPL a vu sa portée drastiquement réduite, plus de décret qui vise à définir les modalités de mise en place du principe de modération et de la mutualisation des équipements radioélectrique des opérateurs télécoms. Seules les modifications substantielles doivent faire l’objet d’une demande à l’Agence Nationale des fréquences et un dossier d’information au maire, ce qui veut dire qu’une augmentation de puissance pourra se faire sans que personne n’en soit informé. Les points atypiques, c’est-à-dire les lieux ou l’exposition est supérieure à la moyenne nationale constatée, ne seront traités que si c’est faisable techniquement, dans le cas contraire ceux qui sont exposés resteront exposés à des seuils élevés … Concernant les mesures d’exposition, les sociétés mandatées devront répondre à des exigences de qualité sans qu’elles soient définies par décret comme ça l’était auparavant. Seul ajout, la création d’un comité national relatif aux niveaux d’exposition du public, il participera « à l’information des parties prenantes sur les questions d’exposition », au final bien peu de choses comparé à ce qui a été retiré.
Dans la suite des modifications, on notera la suppression de l’article sur le mécanisme d’arrêt de l’internet sans fil sur les équipements radioélectrique, remplacé par la mise en place d’une information pour désactiver le wifi facilement, idem pour l’alinéa sur les Femtocells qui devaient pouvoir se désactiver facilement a été supprimé. Les objets connectés ne seront plus contraints de devoir informer qu’ils sont émetteurs de champs électromagnétiques, ni même de préciser leur débit d’absorption spécifique (DAS). L’interdiction de la publicité qui vise le jeune public de moins de 14 ans a été supprimé, de même que l’article qui visait à réglementer la publicité sur les bons usages du mobile (utilisation du kit main libre). Encore supprimé, l’article 6 qui visait à mettre en place une politique de sensibilisation et d’information concernant l’usage responsable et raisonné des téléphones portables. Seule l’interdiction dans les écoles maternelles a été maintenue, en revanche l’alinéa 2 de l’article 7 qui visait à imposer l’extinction du wifi dans les plus grandes sections lors de sa non-utilisation a été supprimé. L’article 8 qui prévoyait la création d’un rapport sur l’électrosensibilité a été supprimé et a été remplacé par sa prise en charge par l’ANSES via une veille sanitaire des effets des radiofréquences et de ce phénomène.
Au final, il ne reste plus grand chose du texte d’origine, les valeurs-limites d’exposition restent précisées par décret, mais comme elles découlent déjà d’un décret transposé du droit européen qui a été lui même inspiré par l’ICNIRP qui considère que les effets des radiofréquences sont uniquement thermique, dont les membres sont cooptés les uns les autres ce qui a pour conséquence une consanguinité de la pensée scientifique, et ne parlons pas des scientifiques qui travaillent en étroite collaboration avec l’industrie des télécoms. La partie information est en partie sauvegardé, les opérateurs télécoms devront fournir aux maires ou aux présidents d’intercommunalité des dossiers d’information sur leurs infrastructures mais d’une part, les informations qui devront être fournies doivent encore être déterminées par un arrêté conjoint des ministres chargés des communications électroniques et de l’environnement, d’autre part, les maires n’auront toujours pas de compétence pour répondre aux attentes des concitoyens lorsque ceux-ci ne souhaitent pas vivre près d’une antenne-relais, ils pourront juste se consoler avec un dossier d’information fourni par l’opérateur deux mois avant l’installation d’une antenne relais et d’un décret du Conseil d’État qui vise à mettre en place une concertation sous l’autorité du maire, assez cocasse quand on sait que ce même conseil n’a jamais voulu reconnaître les autorités locales comme compétentes dans le domaine des radiofréquences, on est plus à une contradiction près. Prochaine étape le vote le 17 juin prochain en séance publique, à voir si le massacre va continuer …
@+ Jay
Lien
Texte d’origine : http://www.senat.fr/leg/ppl13-595.html
Liste des amendements : http://www.senat.fr/amendements/commissions/2013-2014/310/liste_discussion.html
Texte au Sénat après modification : http://www.senat.fr/leg/ppl13-595.html
Pétition pour dénoncer cette mascarade : AVAAZ