Le 26 juin 2014, le Sénat a adopté après modification la proposition de loi relative à la sobriété, à la transparence, à l’information et à la concertation en matière d’exposition aux ondes électromagnétiques initiée par Laurence Abeille le 11 décembre 2013. La navette parlementaire suit son cours et elle nous revient à l’Assemblée Nationale sous le nom de PPL 2065. Même s’il y a eu une incertitude quant à son retour notamment avec l’émission VoxPOP qui avait indiqué qu’elle était bloquée dans le circuit législatif, elle finira finalement par revenir le 20 janvier dernier en commissions de l’Assemblée nationale et le maître-mot est : voté conforme.
Commission des affaires économiques
Cette commission est présidée par le député François Brottes et la rapporteur de la loi sera pour l’occasion la Député Laurence Abeille. Une vingtaine d’amendements ont été déposés et uniquement par l’opposition, l’UMP et l’UDI. En effet si d’aventure un seul des amendements passait, la navette législative suivrait son cours et comme le Sénat est passé à l’opposition, peu de chance que cette proposition de loi en réchappe. Dans un premier temps il y aura les discutions générales avec pour introduction celle du président et de la rapporteur qui reviennent tous deux sur la génère de la loi, la Député Laurence Abeille souhaiterait l’adoption conforme pour éviter les désagréments que j’ai mentionné précédemment. Elle reviendra sur le compromis entre « la sobriété » et « la modération » qui caractérise le but de la PPL concernant l’exposition aux ondes et aussi sur les bénéfices de la concertation concernant l’implantation des antennes-relais.
Du côté de l’opposition nous retrouvons entre autres la Député Laure de La Raudière qui fait partie du groupe UMP et qui déclara dès le début de son discours qu’elle ne voterait pas conforme le texte dans l’état actuel. Elle considère que c’est donner raison au lobby de la peur (sic) et que c’est un très mauvais signal donné aux citoyens car le principe de précaution ne devrait pas s’appliquer aux radiofréquences. De plus, pour elle, l’ensemble de la communauté scientifique aurait statué qu’il n’y a aucun risque avec les ondes issues des antennes-relais. Plus tard durant le vote des amendements, elle indiqua que ce texte ne va servir qu’aux associations qui ont épuisé l’ensemble des recours juridiques contre les implantations des antennes. Concernant l’électrosensibilité, elle considère que le rapport ne répondra pas aux attentes des malades, d’ailleurs elle a déposé l’amendement CE10 pour supprimer l’article sur la question et l’une des solutions serait d’attendre les conclusions de l’étude Cochin.
Suite aux propos de Laure De La Raudière concernant le risque pour la santé liés aux antennes-relais, le député PS François Pupponi a souhaité apporter la précision selon laquelle les spécialistes et les médecins qui ont été auditionnés, ont déclaré qu’ils étaient incapables de dire s’il y a vraiment un risque ou pas. Pour ce dernier, même si la proposition de loi n’est pas parfaite, c’est une bonne base de départ et il la votera conforme. Autre défenseur de cette proposition de loi, le député André Chassaigne qui va évoquer le cas des électrosensibles dont il côtoie certains dans son village et qui n’arrivent pas à faire reconnaître leur handicap. Même s’il déplore que le texte soit en retrait par rapport à la première version, il salue les différents atouts du texte, notamment, la mise en place de la concertation dans le cadre d’une installation d’une antenne-relais, l’information des riverains et la prise en compte des personnes fragiles. Au final, les 21 amendements auront eu un avis défavorable et la proposition de loi a été votée conforme.
Commission du développement durable
La commission du développement durable fera l’objet de beaucoup moins d’amendements, moins d’une dizaine en tout et pour tout, déposés uniquement par les députés Pancher et Favennec appartenant au groupe UDI. Le président de cette commission est le député Jean-Paul Chanteguet et la rapporteur de la proposition de loi sera Suzanne Tallard, député PS qui fera un exposé assez détaillé des différents articles. Elle commença par faire elle aussi la genèse de cette proposition de loi, entre le renvoi en commission du premier texte voté lors de la première lecture à l’Assemblée Nationale en 2012, une deuxième version remaniée qui sera adoptée mais dont le sénat va réduire substantiellement sa portée. Elle a d’ailleurs faillit être bloqué une nouvelle fois dans les tuyaux législatifs mais a été rattrapé par le gouvernement en l’inscrivant durant la semaine qui lui était réservé au Sénat. Elle répond à deux objectifs, le contrôle des émissions et des expositions aux radiofréquences, et la mise en place d’une concertation locale et une médiation au niveau nationale.
Au niveau de l’opposition, on retrouve une nouvelle fois l’UMP avec le député Jacques Kassawski qui évoque la première PPL dont le but aurait visé à limiter le déploiement des antennes-relais ce qui est en contradiction avec les objectifs d’aménagement du territoire. De plus, cela ne repose sur aucun fondement scientifique, l’académie de médecine a dénoncé l’existence de la présomption de dangerosité des ondes défendue par ce texte. Le groupe UDI est tout aussi critique, le député Yannick Favennec rappel que l’exposition est inférieure aux normes en vigueur d’après les travaux du COMOP même s’il reconnaît que le rapport de l’ANSES en 2013 met en exergue une augmentation de l’exposition. Du point de vue scientifique, le risque n’est pas avéré, et il réaffirme son attachement contre la fracture numérique et il ne souhaite pas rajouter des contraintes injustifiées sur les professionnels et sur les collectivités territoriales.
Le groupe écologiste représenté par le député François-Michel Lambert se félicite du travail qui a été effectué pendant ces deux ans, le texte intègre un travail remarquable au vu des crispations que le sujet des ondes peut induire. Il va évoquer la question de la responsabilité du maire en ce qui concerne l’implantation des antennes-relais, malgré ce que pensent les concitoyens, ce n’est pas de sa responsabilité. En permettant au maire d’avoir les capacités de créer le débat et d’offrir la possibilité de déplacer les antennes si nécessaire, cela lui permettra de mieux maîtriser ce qui se passe sur son territoire. Il va saluer la persévérance de la Député Laurence abeille qui a permit d’avoir le texte minimum attendu par les associations, les élus de terrain et les opérateurs. Le député Christophe Priou relèvera quant à lui les diverses tentatives de blocage successif qu’a subi le texte, et montre la difficulté d’appréhender le sujet surtout avec le paradoxe que génère les ondes, les concitoyens veulent toujours plus de connectivité et en même temps ne veulent pas avoir d’antenne-relais proche des écoles de leurs enfants. Tout comme à la commission des affaires économiques, aucun amendement n’est passé et la proposition de loi a été votée conforme.
Avec le passage en commission de cette proposition de loi, on en apprend un peu plus sur le jeu politique actuel. L’une des interrogations était le sauvetage de ce texte par le gouvernement au Sénat après avoir voté le renvoie en commission du premier texte. Soit c’était un problème de Schizophrénie, soit il y avait une raison politique et la réponse viendra de l’opposition, en effet la majorité PS est plutôt en déliquescence et elle est en train de perdre la dite majorité à l’Assemble Nationale, ce qui fait qu’elle a besoin de l’appui des écologistes pour pouvoir continuer à voter ses autres projets de loi. Autre jeu politique celui du lobbying qui est assez peu discret au fil du vote du texte, si on regarde les amendements déposés, on retrouve exactement les mêmes, changement du terme « sobriété » par « maîtrise », suppression du rapport sur l’électrosensibilité, ce qui est étrange, c’est qu’une partie de ces modifications sont à l’initiative du groupe UDI qui a sauvé le même texte au Sénat, surement encore un jeu d’alliance sur l’échiquier politique
@+ Jay