Avec le CESE qui avait auditionné sur l’électrosensibilité, une petite lueur d’espoir était apparue pour ceux qui étaient confrontés à ce problème de santé. Malheureusement, cet espoir avait été vite douché, aucune prise en compte, les ondes sont sans danger, un leitmotiv assez récurrent ces derniers temps dans ce domaine, en même temps comme c’était un consensus politique, ça n’avait pas trop d’impact. Le problème, c’est que le Comité scientifique des risques sanitaires émergents et nouveaux (SCENIHR) en a remis une couche avec son rapport sur l’effet potentiel des ondes sur la santé du 20/01/2015 et encore une fois les ondes ne posent aucun problème mais les associations n’ont pas trop apprécié la façon dont ce rapport a été mené.
En ce qui concerne les radiofréquences, le rapport indique que l’ensemble des études ne démontrent pas d’effet négatif. Les études épidémiologiques ne mettent pas en exergue un risque d’augmentations de tumeur au cerveau. Certaines d’entre elles ont bien mis en relief la question des risques de gliome et de neurinome acoustique pour les utilisateurs intensifs de téléphone portable, cependant les études de cohorte et d’incidence sur la durée ne confirment pas ce risque concernant les gliomes, la question des neurinomes reste ouverte.
Au niveau de la modification du potentiel électrique produite par le système nerveux et du ralentissement des oscillations cérébrales, les résultats sont contradictoires. Il y a un manque de données pour ce qui concerne les groupes en fonction de l’âge, cependant une étude démontre que l’activité cérébrale des enfants et des adolescents semble moins affectée par l’exposition aux radiofréquences. Les précédentes preuves d’impact sur l’activité cérébrale par les ondes dans les études EEG (encéphalographie), que ça soit éveillé ou durant le sommeil, apparaissent aussi dans les nouvelles études prises en compte.
Les études sur les maladies neurologiques ne montrent pas de lien probant avec les ondes, mais les preuves sont encore limitées. Les études sur le développement infantile et les problèmes comportementaux ont des résultats contradictoires et rencontrent des limitations au niveau de la méthodologie. Au niveau cognitif, des résultats ont été trouvés mais avec des critères de mesure assez différents, les résultats des diverses études sont peu cohérents. La dernière version du rapport avait conclu qu’il n’y avait pas d’effet négatif en dessous des seuils réglementaires qui protègent de l’effet thermique. Les dernières données concernant l’exposition sur l’humain ou l’animal confirment cette évaluation.
Concernant les électrosensibles, les symptômes qu’ils attribuent à l’exposition aux ondes peuvent avoir des impacts important sur leurs qualités de vie. Cependant, les recherches depuis le dernier rapport n’ont pas permis de confirmer le lien entre les symptômes et l’exposition aux ondes. Les récentes méta-analyses qui intègrent des études de test de provocation sont arrivées aux mêmes conclusions, aucune preuve que les symptômes soient liés à une exposition aux ondes à court terme ou à long terme, cependant il y a des manques au niveau des protocoles de surveillance de l’exposition pour le long terme.
Après avoir lu ça, on pourrait se sentir rassuré quant aux effets des expositions aux radiofréquences, les autres bandes de fréquence ne présentant aucun risque non plus dans ce rapport. Le problème, c’est que les associations et certains scientifiques ne voient pas ce rapport d’un bon œil et ils ont quelques critiques concernant sa réalisation, que ça soit sur la forme ou sur le fond. Le premier grief concerne le groupe de travail dont les membres ont été nommés sans que l’on sache exactement selon quel critère. Autre sujet, le manque de diversité de la pensée scientifique, les scientifiques auraient la même vision « optimiste » de cette problématique ce qui pourrait avoir une incidence sur les conclusions qui semblent tout aussi optimistes.
Sur le fond, il apparaît que ce rapport a été réalisé sans capitaliser sur le précédent qui intégrait les études jusqu’à 2008, alors que celui-ci intègre seulement les études de 2008 à 2013. Au niveau des études, certaines étaient considérées comme pertinentes alors que d’autres non sans que l’on sache pour quelle raison elles avaient été écartées. D’autres études ont été écartées parce qu’il y avait un manque d’information concernant la dosimétrie combien même l’étude aurait pu être pertinente et sans faire l’effort de contacter les auteurs de l’étude. Inversement, certaines études, comme la cohorte danoise de Benson et al, ont été intégrées alors qu’elles ne répondaient pas aux critères de pertinence.
C’est en partie pour ces raisons que les associations ont porté plainte auprès de la médiatrice et de la commission afin de faire la lumière sur le déroulement de la réalisation de ce rapport. Une enquête pourrait permettre de voir s’il n’y a pas eu de conflit d’intérêts ou de connivence avec l’industrie des télécoms qui aurait conduit à rendre un rapport biaisé et qui ne ferait pas un état objectif de la littérature scientifique concernant les effets de l’exposition aux ondes. C’est peut-être anecdotique, mais la controverse scientifique étant relativement vive, il paraît peu probable que la section opinion minoritaire soit laissée complètement vide, à moins que les scientifiques « sélectionnés » soient des béni-oui-oui ce qui expliquerait ce consensus aussi tranché.
@+ Jay
Analyse de Dariuz Leszczynski (en) : Very problematic SCENIHR Report